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Vendre en viager pour déshériter : est-ce possible ?

vendre en viager pour déshériter

En cas de conflits familiaux, certains peuvent être tentés de vendre en viager pour déshériter leurs héritiers.

Qu’en est-il ? Pouvons-nous vraiment déshériter nos héritiers avec le viager ?

Droit factuel : le droit des successions est source de polémiques que la jurisprudence et la loi tentent de régler. Entre autres, certains se demandent s’il est possible de déshériter ses héritiers en vendant en viager.

Si vous vous êtes posé une fois la même question, c’est l’occasion pour vous de mieux comprendre ces enjeux. 

Pourquoi penser à la vente en viager pour déshériter ?

Le viager est un type de vente et d’acquisition spécifique au domaine immobilier. Dans la pratique, il s’agit de vendre un immeuble, un appartement ou une maison à un acheteur contre le versement d’une rente viagère à vie.

La particularité de la vente en viager est que la date du décès du vendeur appelé « crédirentier » est imprévisible. Le contrat ne tient pas si celui-ci meurt dans les 20 jours suivants la signature du contrat de vente.

Par conséquent, l’acquéreur appelé « débirentier » ne doit pas signer le contrat sachant que la mort du vendeur est imminente, quelle qu’en soit la cause. 

La vente en viager peut être libre ou occupée. Dans le premier cas, l’acquéreur dispose du bien juste après signature du contrat. Il peut donc l’occuper ou le mettre en location et percevoir les loyers de la location.

Dans le second cas, c’est le vendeur qui peut continuer à occuper le bien toute sa vie ou le mettre en location s’il dispose de l’usufruit.

Le « bouquet » constituant la partie du montant de la vente versé comptant n’est pas obligatoire. Il est librement fixé par les contractants et équivaut très souvent à 30% du montant total de la vente.

Le reste est perçu par le vendeur comme rente viagère jusqu’à sa mort ; mensuellement, trimestriellement ou annuellement. Le calcul est fait par le notaire en fonction de l’âge du vendeur et la valeur du bien.  

Est-ce légal de déshériter un héritier ? 

Le principe général n’autorise pas un parent à déshériter son enfant au regard de l’article 912 et suivants du code civil français. De droit, les enfants ont une part indiscutable dans la succession.

Cette part leur revient en tant que « héritiers réservataires ». Ce statut seul suffit déjà pour jouir des biens des parents. Toutefois, le parent peut faire de la quotité disponible ce qui lui semble bon.

Citons clairement l’article 912 du code civil pour mieux comprendre le principe :

La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent.
La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités.

source : article 912 du Code Civil

Il n’est donc pas possible de déshériter un enfant, puisque le premier alinéa de cet article relève de l’ordre public.

Mais on peut le faire en partie par voie testamentaire, en agissant sur la quotité disponible. 

Déshériter avec le viager : cela fonctionne ? 

Vendre en viager pour déshériter, c’est priver ses héritiers de leur part d’héritage.

Légalement, en France, il n’est pas possible d’en décider sauf dans les cas autorisés par la loi.

Face à cette impossibilité, il est néanmoins possible de vider l’actif de son patrimoine de tout ou partie de son contenu.

Pour différentes raisons, on décide donc de priver les héritiers réservataires que sont les enfants de leur droit à la succession. L’un des actes pour atteindre cet objectif pourrait être la vente en viager.

En effet, la vente d’un bien immobilier, même en viager, le fait sortir du patrimoine du vendeur. Ce dernier pourra continuer à y habiter s’il dispose d’une réserve de DUH (ou d’usufruit) et consommer le bouquet et les rentes afin de ne pas les laisser dans la succession le jour de son décès.

Sens de la vente en viager pour déshériter

Le sens de la vente en viager pour déshériter est appréciée de diverses manières selon la législation de chaque région.

Si certains y voient dans cette vente une manière de déshériter les enfants, d’autres y voient une manière d’aider les enfants. La première perception est valable dans les pays où les enfants ne sont soumis à aucune obligation de subvenir aux besoins des parents. 

En Belgique par exemple, plusieurs parents supposent qu’ils rendent la tâche facile aux enfants au regard de la loi en vendant en viager. S’assurant ainsi un revenu périodique, les enfants n’ont plus l’obligation légale de la pension alimentaire. L’article 205 du code civil Belge l’appelle « Solidarité familiale ». Cela n’est pas pareil dans tous les pays.

Toutefois, ce n’est plus une manière de déshériter les héritiers lorsqu’on en parle avec eux avant de signer le contrat.

Est-ce que j’ai besoin de l’accord de mes héritiers avant de vendre en viager ? 

C’est une question que l’on peut se poser avant de vendre en viager en présence d’héritiers, comme les enfants.

La réalité est tout autre dans la mesure où vendre en viager ne constitue pas une infraction. L’intention de le faire pour déshériter les enfants n’étant pas facile à prouver, elle ne peut être reprochée que par défaut.

Sinon, l’accord des enfants n’est pas obligatoire.

Néanmoins, il est conseillé de demander l’avis des héritiers pour leur montrer que l’intention n’est pas de nuire à leurs intérêts.

De plus, il ne faudrait pas que les héritiers se retournent contre vous et l’acheteur du viager une fois la transaction effectuée. C’est la raison pour laquelle il et conseillé d’être totalement transparent avec vos héritiers pour éviter tout litige futur.

Enfin, si vous êtes copropriétaire, l’avis des autres copropriétaires est important et obligatoire. C’est le cas si vous vendez votre bien que vous déteniez avec votre conjoint décédé et que vos enfants ont hérité en indivision.

Trouvez une alternative à la vente en viager pour déshériter

Il est très facile de vous soupçonner de déshéritement si vous vendez en viager. Pourtant, ce n’est pas une faute si c’est votre volonté. Plusieurs parents le font d’ailleurs pour déshériter « légalement » leurs héritiers. 

Si vous vous retrouvez en position d’acheteur, prenez toutes vos dispositions pour ne pas assister à l’annulation de votre achat par les héritiers après le décès du vendeur. Le notaire vous aidera mieux pour éviter tout risque de perte.

Si l’intention n’est pas de déshériter les héritiers, informez-les. C’est notamment le cas si vos finances ne vous permettent plus de maintenir votre niveau de vie. De cette manière, vous protégez vos enfants car c’est à eux de subvenir à vos besoins en cas de nécessité.

C’est une première solution.

Et si vous vendez en viager à plusieurs héritiers ? La loi ne s’y oppose pas. C’est d’ailleurs une autre manière de conserver le bien dans la famille tout en obligeant indirectement l’enfant à assurer son devoir moral de soutien à ses parents si nous sommes dans une relation parents / enfants.

Attention !  Ce n’est pas une alternative pour frauder le fisc.

Soyez vigilant et réaliste sur le prix de la vente et celui de la rente pour ne pas faire une « donation déguisée ». La loi parle de prix « conséquent et sérieux ». Le cas contraire, vous aurez au dos l’administration fiscale.

Comment vendre en viager à l’un des héritiers ? 

Vendre en viager à un héritier est peu complexe car vous risquez de privilégier un enfant au détriment des autres.

Les autres enfants risquent de considérer cette vente comme une discrimination.

C’est pourquoi leur accord est nécessaire.

Il faudra imputer sur la quotité disponible la valeur en pleine propriété du bien.

Cela est important pour la légalité et la légitimité de la vente.

En savoir plus sur le viager et l’héritage

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